Lorsque les fondations d’une cabane, repérée sur le cadastre de 1851, ont été mises au jour, en novembre 2018, lors de la réfection du mur nord de l’enclos des Feuillants, nous avons interrogé Madeleine Festeau-Sicardet pour savoir si elle avait gardé le souvenir de cet édicule. Voici son témoignage.
« Mes souvenirs sont ceux d’une enfant de moins de 8 ans, naïve, insouciante et peu observatrice. J’ai appris le mot « cabotte » quand les vignerons et les médias ont mis l’accent sur les climats. Je ne connaissais pas d’autres cabanes ou cabottes à Fontaine. Dans la famille on parlait de celle-ci comme de « la cabane des Duperat » : on ne mettait pas de « monsieur » car les hommes entre eux, et les femmes aussi, allaient au plus court. Cet homme de Daix, célibataire, vivait avec sa sœur, de même situation[1]. J’admirais le verger[2] bien entretenu[3] par eux.
La cabane était à droite en entrant dans le verger, à quelques pas du chemin des Vaux. Elle était très rustique. L’eau de pluie coulait du toit. Elle était montée en laves et couverte de même. Le sol était en terre battue. Deux bancs pour s’asseoir, aussi en laves[4], garnissaient les murs de chaque côté. La cabane n’avait pas de porte mais l’ouverture était relativement large. Dans le fond, on apercevait un morceau de ciel car une pierre avait été enlevée ou était tombée. La cabane n’était pas très haute. Il me semble qu’une personne de grande taille aurait eu du mal à s’y tenir debout.
Je n’ai pas connu de cheminée. Cette petite attraction était sans doute ancienne. Le mur du fond, pas très haut[5], semblait avoir été élevé sur le mur d’enceinte du champ cultivé le long du chemin qui rejoignait, en haut, le Bois des Pères[6].
Ouverte côté nord, elle appartenait à tout le monde. À part un abri de mauvais temps, elle ne servait pratiquement à rien. Personne n’y entreposait quoi que ce soit mais on y mettait pour quelques heures la boisson et nos casse-croûte.
J’y passais du temps avec une petite cousine. C’était un endroit magique. La maison toute faite, comme un chalet, nous appartenait, à nous deux, pour jouer avec nos enfants imaginaires… Nos parents, au travail dans leur vigne, savaient où nous étions… De l’autre côté du chemin, en effet, était la grande vigne entretenue par mes parents qui a été arrachée vers 1968.
En passant un jour, après bien longtemps, je n’ai plus vu ni cabane, ni verger. C’était comme un trou. Elle manquait cette cabane… »
[1] André Duperat, né à Daix en 1909 était divorcé. Sa sœur, Berthe, cultivatrice, née en 1898, était célibataire.
[2] Aujourd’hui, le verger de Fontaine.
[3] André Duperat était arboriculteur.
[4] Pierres plates calcaires provenant en général de l’épierrement des sols.
[5] Indication possible d’un toit à une seule pente.
[6] Dans le parc Saint-Bernard.