La vigne plantée en foule à Fontaine-lès-Dijon

À Fontaine, jusqu’à la fin du XIXe siècle et la crise du phylloxéra, la culture de la vigne en foule était la seule pratiquée. Les parcelles étaient plantées d’arbres fruitiers et les ceps étaient disposés librement et en grande densité (20 000 à 24 000 pieds à l’hectare[1]). Cette viticulture était travaillée exclusivement manuellement. La traction animale qui impose un passage linéaire dans la vigne n’était pas de mise, d’autant que les chevaux à Fontaine étaient rares. Les ceps pouvaient donc être serrés, d’où l’origine du mot « foule », et se trouver irrégulièrement plantés. L’homme se faufilait entre eux.

Même si, à l’origine, la vigne neuve avait été plantée en rang, cet ordonnancement était bousculé par la technique du provignage annuel (du latin propaginem « bouture »). À Fontaine, on employait le mot « recouchage ». Bien que dispendieuse, cette technique de multiplication de la vigne était jugée indispensable pour renouveler progressivement une vigne. On préparait les « provins » en février ou mars. Pour cela, on couchait les ceps dans de grandes fosses contiguës de 1 à 2 m de long, de 60 à 80 cm de large et de 20 à 60 cm de profondeur[2], qu’on recouvrait de terre. Comme tous les autres ceps, quand les saillies (deux en général) avaient atteint assez de hauteur, elles étaient attachées à un paisseau, c’est-à-dire à un piquet solidement enfoncé dans le sol pour soutenir le plant et le guider dans sa pousse tout au long de son cycle végétatif. Dans une plantation en foule, chaque paisseau signalait la présence d’un cep[3].

Les vignes en foule ont été abandonnées à la fin du XIXe siècle et surtout au XXe siècle avec la reconstitution du vignoble détruit par le phylloxéra. L’introduction de plants greffés, la généralisation du palissage et des rangs de vigne ont permis l’introduction du cheval et la mécanisation. Le vignoble a alors changé d’apparence car le système de provignage, où le même pied renaissait sans cesse par marcottage et la haute densité des ceps conduisaient à donner au vignoble une allure désordonnée très éloignée des paysages viticoles actuels avec des rangs de vigne sans arbre dans les parcelles.

Sigrid Pavèse

 

[1] Archives municipales de Fontaine-lès-Dijon, F2, statistique décennales, 1882.
[2] GENRET-PERROTTE, Rapport sur la culture de la vigne et la vinification dans la Côte-d’Or présenté le 2 octobre 1853 au Comité central d’agriculture de Dijon, Dijon, 1854. Fontaine-lès-Dijon, questions 35 à 37.
[3] Remerciements à Émile DELESTRE, (Association Cadoles et Meurgers, Hauteville) et à Bruno LAUTREY pour la documentation transmise.

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