Le chantier de la maison du pressoir construite par le chancelier Rolin en 1451 à Fontaine-lès-Dijon

La maison du pressoir construite par le chancelier Nicolas Rolin en 1451 prend la place d’un bâtiment en ruine qu’il faut achever de démolir avant d’évacuer les décombres après avoir trié et récupéré ce qui est utilisable. Même sur de courtes distances, des moyens de transport sont nécessaires car il s’agit de pondéreux. Ce sont des Fontainois[1] qui se chargent des transferts en fournissant des charrettes tractées par un ou deux chevaux, ce qui démontre une certaine aisance de leurs propriétaires. La terre enlevée est conduite dans les vignes du seigneur et les pierres inutiles dans un champ. Les charretiers fontainois vont aussi chercher le sable et la chaux, ainsi que le linteau en pierre d’une des futures portes[2]. Ils sont aidés par des manœuvres pour le tri et le chargement. Ces ouvriers, parfois appelés valets, sont présents à toutes les étapes du chantier. Ils sont anonymes et leur nombre est inconnu. Ils sont payés tantôt par les artisans, tantôt directement par le receveur du chancelier. Ils creusent la roche qu’ils font éclater, gâchent le mortier, portent les outils, les pierres et les laves qu’ils hissent et étendent.

La pierre des moellons est tirée des carrières de Dijon et il faut 260 voitures à deux chevaux au perrier (carrier) pour la transporter à Fontaine. Les 80 pierres de taille blanches nécessaires à l’encadrement des ouvertures proviennent de la carrière d’Asnières pour un montant équivalent à celui des moellons. Quant aux laves de la toiture, dont le coût global est plus élevé que celui des moellons ou de la pierre de taille, elles sont fournies par quatre laviers d’Ahuy. Les 50 faîtières et les deux gouttières sont apportées par un autre marchand.

La maison est à pierre vue, ce qui est la norme pour un pressoir, mais le bois tient une place importante pour la confection des alloirs (échafaudages), la charpente et les ouvertures. Les pièces de bois équarries sont achetées au marché de Saint-Michel et Saint-Nicolas à Dijon. Pour les cinq entraits utilisés, deux sont taillés par des charpentiers de Fontaine-Française et trois autres à Épagny. Les 48 chevrons sont produits par deux charpentiers de Fontenelle. Les lattis proviennent de la charpenterie du cimetière Saint-Michel à Dijon. Les battants des portes sont réalisés à Dijon par un lambrisseur (menuisier) avant d’être conduits à Fontaine par un transporteur.

Sur place, c’est une main d’œuvre qualifiée provenant surtout des villages alentour qui se charge du gros œuvre. Les échafaudages sont réalisés par un Fontainois. Les murs sont montés par trois maçons, dont deux viennent respectivement d’Ahuy et Vantoux. Ces maçons sont payés à la toise effectuée (mesure de surface), les ouvriers à la journée. C’est le charretier fontainois ayant fourni un véhicule de transport qui se charge des ouvertures, qui donnent directement chez lui, et de la cheminée ordinairement placée dans le pignon. La charpente, qui est un des postes de dépense les plus importants du chantier, est assemblée par un Dijonnais. La toiture est réalisée par trois laviers, un de Prenois et deux de Daix. Un forgeron installe le barreaudage des fenêtres. Un serrurier livre les gonds, les serrures et un barreau de fer, un potier, le plomb pour les souder. On ignore combien de temps il a fallu pour réaliser cette maison.

 La maison du pressoir du chancelier Rolin est une œuvre de professionnels. 34 prestataires bien identifiés sont mis à contribution pour ce chantier, mais aucun maître d’œuvre n’apparait. Le chantier fait intervenir de nombreux corps de métier des villages environnants et travailler une main d’œuvre locale qui assemble essentiellement des matériaux dégrossis et achetés ailleurs.  L’organisation du transport pour alimenter le chantier est coûteuse, aussi les matériaux proviennent des endroits les plus proches pour diminuer les frais. Pour le chancelier, l’investissement est important : il absorbe plusieurs années de revenus de la seigneurie.

 

Sigrid Pavèse avec la collaboration d’Antoine Lacaille et d’Élisabeth Réveillon.

[1]Archives départementales de Saône-et-Loire, 2 E 135.1, registres de comptes de 1451 ; Archives diocésaines de Dijon, 8 D 102, Fonds Philbée : Huguenin le Gonot : 18 journées de charrette à deux chevaux, Moingeot Mathélie : 31 journées à deux chevaux et 9 à un cheval ; Villemot le Pinaullet et Moingeot Mathélie apportent au champ un tas de pierres ; Moingeot Mathélie et Hugues Le Gruet transportent la terre.
[2] Cette porte avec un linteau de pierre n’est pas assez large pour être charretière. L’autre porte a probablement un linteau de bois.

Le pressoir Rolin à Fontaine-lès-Dijon en 1451

En 1451, dans la maison qu’il a fait édifier pour l’abriter, le chancelier Nicolas Rolin fait construire à neuf un grand pressoir communautaire (pressoir banal) connu grâce aux registres de comptes des seigneuries qu’il fait tenir[1]. Il s’agit d’un pressoir en bois à levier et à vis, d’un type sans doute semblable à celui qu’on peut voir au clos de Vougeot[2].

Ses dimensions sont impressionnantes. L’arbre (levier) est constitué par un assemblage de quatre poutres juxtaposées de 9,75 m de long[3] et 16 cm de section chacune, solidarisées à l’aide de bois et de métal. Un plateau (matiz, maie) pour lequel deux grosses poutres ont été achetées est encadré par quatre colonnes (les jumelles) de 5,81 m par 0,60 m. 14 poutres de bois de 4,36m de long et 16 cm de section servent aux fondations du plateau et aux échelles. Plus de 200 kg de fer sont utilisés pour lier et consolider l’ensemble.

Le levier est actionné par l’intermédiaire d’un trosson (vis). Le pied de la vis est retenu au sol par des pièces de bois appelées taissons, ancrées dans une fosse creusée dans la roche pour résister à la force d’arrachement. La vis fixée au levier par un écrou en bois de noyer est mue par une barre amovible engagée dans une mortaise traversante située à sa base. Pour la pressée, le levier appuie sur une superposition de madriers en bois de chêne (les marres) placés sur des planches (les ais) qui recouvrent le raisin.

Ce pressoir a été fabriqué avec du bois choisi dans la forêt d’Autrey en Haute-Saône par le charpentier qui a travaillé à la charpente de la maison. Les différents éléments ont été préparés et livrés par un prestataire d’Épagny. Le plateau, constitué par des pièces juxtaposées serrées par des coins et entaillées pour former le bassin, qui canalise le jus vers une goulotte, a été assemblé à la charpenterie du cimetière de Saint-Michel avant d’être apportée à Fontaine. L’installation du pressoir n’a pas fait l’objet d’un compte particulier.

 

Sigrid Pavèse en collaboration avec Antoine Lacaille et Élisabeth Réveillon.

[1] Archives départementales de Saône-et-Loire, 2 E 135.1 : Registre de comptes de 1451.
[2] LAUVERGEON (Bernard), « Les grands pressoirs bourguignons préindustriels : essai de chrono-typologie », In situ, 5, 2004.
[3] Les leviers des pressoirs des duc à Chenôve mesurent 9 m de long et 95 cm de section.

Fontaine-lès-Dijon dans le Bien public de 1967

En 1967, la population de Fontaine atteint 3 482 habitants soit une augmentation de 36 % en huit ans. Cette forte croissance démographique nécessite des travaux d’équipement mais les mesures restrictives prises par le gouvernement en matière de subventions freinent les réalisations de la commune. Celle-ci doit avoir recours à l’emprunt pour la création de classes provisoires, puisqu’elle n’a pas obtenu l’autorisation de nouvelles tranches de travaux d’extension pour chaque groupe scolaire, l’achat de terrains pour l’agrandissement du cimetière ou les deuxième et troisième tranches de l’assainissement. La municipalité continue à se montrer favorable à des lotissements privés, mais les difficultés d’approvisionnement en eau la contraignent à freiner certaines réalisations, comme celles de la rue des Félizots. Il est de plus en plus évident que l’évolution des programmes de logements, effectués au gré des opportunités foncières par les promoteurs, doit être mieux encadrée que par les dispositions du plan d’urbanisme directeur de 1964. Par ailleurs, la commune qui a toujours tenu à son indépendance, comme toutes les communes voisines, est obligée, pour des raisons de rationalité de gestion, de dépasser le cadre des négociations de commune à commune et d’entrer dans celui de l’association avec les communes limitrophes. C’est ainsi qu’elle participe, dès sa création, au SISAD (Syndicat Intercommunal des Services de l’Agglomération Dijonnaise) qui comporte trois services communs : transports en commun, enlèvement des ordures ménagères et Agence Intercommunale d’Urbanisme Dijonnaise (AGIUD). Les compétences du SISAD ne peuvent qu’être amenées à se développer et dès 1967, elles s’étendent à l’assainissement. On voit que le SISAD est l’embryon qui deviendra le district, puis la COMADI et enfin Dijon métropole.

La grande opération de 1967 est la réalisation des 600 m du boulevard des Allobroges entre la rue de Fontaine et le boulevard Galliéni, qui permet d’avoir un boulevard périphérique ceinturant Dijon de manière ininterrompue du pont des Chartreux à la place Roger Salengro. C’est la fin des embouteillages créés par le transit au centre de Dijon pour aller par le nord de la RN71 à la RN 74.

Avec l’urbanisation, une page du Fontaine rural se tourne une nouvelle fois avec l’alambic qui ne s’installe plus à l’entrée de l’hiver dans la commune. Les bouilleurs de cru doivent se rendre désormais à Daix. Par ailleurs, la mesure qui avait considéré les friches communales comme réserve de chasse est reconduite. La demande de location du droit de chasse par la société de chasse « La Diane de Fontaine-lès-Dijon » est rejetée, car cette société revêt un caractère privé, puisque depuis longtemps elle n’accueille plus tous les chasseurs de Fontaine-lès-Dijon.

La rubrique de Fontaine s’enrichit des photos de mariage, de communions privées, de communions solennelles et de confirmations, tandis que l’animation culturelle locale s’engage sur la voie de la neutralité religieuse avec la création de l’association chantante « l’Eau vive », association qui groupe 60 enfants et adultes. Cependant, pour des raisons de disponibilité des locaux, les enfants répètent le jeudi dans la salle annexe de la chapelle Saint-Martin, alors que les adultes qui répètent le soir ont à leur disposition une salle de la mairie.

La pause du milieu de semaine pour les écoliers est le jeudi jusqu’en 1972. À la fin de leur cursus à l’école élémentaire, les écoliers continuent à passer le certificat d’études primaires. C’est ainsi que onze filles et cinq garçons sont reçus. L’examen d’entrée en sixième subsiste pour ceux qui ne justifient pas d’un niveau suffisamment élevé pour être admis. Tous les élèves d’une classe d’âge sont loin d’être admis. Seuls les « meilleurs » le sont, comme l’indique la légende des photos des 40 enfants avec leur nom et prénom.

Politiquement, aux élections législatives de mars 1967, les Fontainois votent à 55% pour Henri Berger, représentant le camp présidentiel du général de Gaulle qui, s’il dispose encore de la majorité absolue, frôle la défaite avec la remontée de la gauche.

Sigrid Pavèse

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