Au XIXe siècle, toutes les vignes à Fontaine étaient échalassées ou empaisselées. Le paisseau était le tuteur du cep. L’empaissellement était le fichage des paisseaux. Entre mars et avril, à mesure que le premier labour était exécuté avec une grosse pioche appelée « meille », et avant que la végétation ne se montre pour ne pas faire tomber le bourgeon, le vigneron enfonçait le paisseau à force de bras[1] dans la terre fraîchement remuée, à une profondeur suffisante pour que la plante ne donne pas prise au vent et soit renversée à terre. Au XIXe siècle, il s’aide d’un fiche-échalas. Le cep était ensuite attaché au paisseau avec un brin de paille de seigle entortillé deux fois autour de l’ensemble. Après les vendanges, les paisseaux étaient arrachés pour éviter que l’extrémité située dans le sol humide ne pourrisse en hiver. C’était le dépaissellement. Les paisseaux étaient placés de distance en distance en tas. À l’aide d’un « gouet », c’est-à-dire d’une serpe, chaque pointe cassée ou émoussée dans la terre était aiguisée et les copeaux récupérés dans une hotte ou dans un panier. Les paisseaux étaient disposés en tas inclinés appelés « bordes » pour passer l’hiver. Ils étaient prêts à être replantés au printemps où ils restaient jusqu’à l’automne et ainsi de suite. Quand ils devenaient trop courts par les aiguisements successifs ou pourris par leur usage, ils étaient renouvelés. Pour mener à bien cet ouvrage, de nombreux jours de travail étaient nécessaires. Le paisselage était pénible pour le vigneron et de plus en plus onéreux pour le propriétaire, tant par la raréfaction du bois consécutive au défrichement des forêts lié à la révolution industrielle, que par l’augmentation progressive du prix de la main-d’œuvre. Malgré tout, il était jugé indispensable pour soutenir la vigne et faciliter la maturation du raisin, et on disait ne connaître aucun moyen de le remplacer d’une manière satisfaisante[2] bien que le palissage sur fil de fer, plus économique, soit connu[3]. Des sources[4] indiquent qu’il était « ouvrage de femmes » mais l’enquête de 1853[5] n’utilise que le mot « vigneron » pour répondre au questionnaire sur le sujet. Il est néanmoins certain que, contrairement à ce que montre la carte postale des années 1900, les femmes, qu’elles soient de la famille ou des manouvrières, ne se contentaient pas de regarder l’homme planter le paisseau et qu’elles jouaient un rôle actif dans le liage et la mise en tas des paisseaux.
Sigrid Pavèse
[1] ROZIER, Cours complet d’agriculture, Hôtel Serpente, 1783, t. 4, p. 114-118.
[2] GENRET-PERROTTE, Rapport sur la culture de la vigne et la vinification dans la Côte-d’Or présenté le 2 octobre 1853 au Comité central d’agriculture de Dijon, Dijon, 1854. Fontaine-lès-Dijon, question 46.
[3] MICHAUX (François-André), Échalas, paisseaux et lattes, Médoc, remplacés par des lignes de fil de fer mobiles, Paris, 1845, BNF.
[4] MORELOT (Denis), Statistique de la vigne dans le département de la Côte-d’Or, Paris, 1831, p. 203.
[5] GENRET-PERROTTE, Rapport sur la culture de la vigne et la vinification dans la Côte-d’Or présenté le 2 octobre 1853 au Comité central d’agriculture de Dijon, Bibliothèque municipale de Dijon, questionnaire de Fontaine-lès-Dijon.